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Violences sexuelles, ne restez pas seul

18 Mai 2022 | Article

Une jeune patiente entre dans mon cabinet. Elle s’assoit face à moi. Les mains serrées entre ses jambes toutes minces. Elle tremble… Tantôt elle me regarde fixement, tantôt elle fuit mon regard. Elle me consulte pour un malaise au travail. Elle souffre de ses relations professionnelles et ne comprend pas que sa situation professionnelle se soit détériorée si rapidement suite à un changement d’organisation et de management.

Après quelques séances, quand je m’étonne de l’intensité de son émotion et de ses larmes au moment du récit de sa situation professionnelle elle me dit : « Je dois vous dire quelque chose, c’est pour cela que je viens vous voir ». Elle se sent prête à me parler. Elle le fera la séance suivante.

Elle revient et raconte… elle a été violée… en 2017… Depuis elle a gardé le secret mais cette agression la hante chaque jour. Agression qui a fait resurgir une agression subie lorsqu’elle était enfant.

Le véritable travail peut commencer, le long chemin de l’acceptation puis de la reconstruction de l’estime de soi.

Il y a de nombreuses années, mais je m’en souviens comme si c’était hier, une jolie Maman aux yeux délavés m’amène sa toute petite fille de 3 ans qui, depuis bébé, non seulement ne dort pas mais hurle toute la nuit. Pour qu’elle ne réveille pas ses frères et sœurs la Maman est obligée de la prendre dans son lit toutes les nuits. Elle est épuisée.

La séance commence, l’enfant trop jeune pour discuter va de moi à sa maman avec un jouet, souriante, câline… Je pose à la Maman les questions d’usage sur le développement de la petite fille, sur la grossesse… rien à noter… Puis je pose la question suivante : « Et vous madame, vous est-il arrivé quelque chose quand vous aviez son âge ? ». Elle s’effondre en pleurs et raconte : « de ma naissance à l’âge de 6 ans j’ai été violée par un ami de mon père… mon père était complice… il m’amenait chez lui…». Sa parole se libère, sa haine, sa souffrance, l’horreur, l’impensable… La petite fille semble écouter sans écouter, câlinant sa maman, venant parfois sur mes genoux, comme prenant ma place. La séance se termine, nous reprenons rendez-vous pour la semaine suivante.

Quand je les retrouve toutes les 2, la Maman me dit : « elle dort comme un bébé depuis notre séance ! Tout va mieux à la maison et je suis enfin reposée, libérée !».

Des histoires similaires j’en entends quotidiennement dans mon cabinet.

Des hommes, des femmes, maltraités, violentés, violés par un père, un oncle, un grand-père, un ami de la famille, parfois mais plus rarement un inconnu.
Et quasi invariablement le silence, l’impossibilité de parler… et la honte, la peur, la culpabilité…

Puis les séquelles qui s’ensuivent… troubles du comportement alimentaires, échec scolaire et professionnel, perte de mémoire, anxiété, dépression… et répétitions : harcèlement au travail, conjoint abusif, impossibilité de construire une vie satisfaisante… Sans parler de la sexualité… du sommeil… de la dépréciation de soi… Et la peur, toujours la peur…

Malheureusement ce silence ne fait qu’accentuer les séquelles et comportements de vie inadéquats.

Alors si vous avez été victimes de violences sexuelles, ne restez pas seuls, il existe des psychologues, des associations, des groupes de paroles. Choisissez le vecteur qui vous convient le mieux. Ce sont des spécialistes, ils sauront vous aider, vous soutenir, vous apprendre à dire non, à vous redresser.

Être entendu, compris, accueilli, soutenu est la première étape indispensable à la reconnexion à soi-même afin de reprendre une route plus douce et respectueuse de ses véritables besoins.

Pourquoi se faire aider ?

Pour soi, pour ses proches, pour revivre, pour comprendre qu’on n’y est pour rien… pour exprimer sa colère, pour tout ce dont on a besoin pour enfin être soi.

Sachez que les violences sexuelles ne sont ni subies ni exercées par un profil-type de victimes ou d’agresseurs.

Les victimes sont de toutes origines, de tous âges et de toutes catégories sociales.

La violence sexuelle n’est pas forcément violente mais elle force à faire quelque chose (poser nu, montrer ses parties intimes…) … Il n’y a pas forcément de contacts physiques…

C’est pourquoi vous devez vous adresser à des professionnels. Ils vous aideront à identifier la violence à laquelle vous avez fait face, vous serez accompagnés. L’isolement renforce les mécanismes de défense mis en place pour survivre psychiquement à l’agression.

Pour cela vous avez besoin :

– Que l’on vous croit
– Que l’on vous dise que vous avez bien fait de venir et de demander de l’aide
– Que l’on valide ce que vous ressentez pour rendre vos ressentis légitimes
– Que vous puissiez parler librement de ce que vous avez vécu

Cela vous permettra de reconstruire une image de soi positive.

Faire une thérapie c’est pouvoir, à nouveau, se projeter dans la vie, redonner du sens, retrouver la force de se faire respecter, retrouver le plaisir de vivre, retrouver sa dignité.

Faire une thérapie, c’est grandir, c’est faire face, c’est décider que vous avez de la valeur.

Et de la valeur vous en avez. Vous êtes unique, ne l’oubliez jamais !

 

Association « Stop aux violences sexuelles » www.stopauxviolencessexuelles.com (Atelier thérapeutique)

Article co-écrit avec Laure CERESIANI, Psychologue du travail, Thérapeute en relation d’aide.

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